vendredi 1 décembre 2017

La rencontre « très, très rapprochée » d’Antonio Villas-Boas




Ce fermier brésilien devint célèbre en 1957 lorsqu’il annonça, le plus sérieusement du monde, avoir fait l’amour avec une créature féminine d’origine extraterrestre!

Son histoire, prise au sérieux par les ufologues de l’époque, est devenue un cas « précurseur » de la vague récente des enlèvements dont elle constitue une version « soft » ; elle s’inscrit aujourd’hui dans le patrimoine folklorique de l’ufologie des années 1960 trop souvent crédule, mais combien emblématique.

Au point que nous en sommes encore influencé jusque dans nos rêves pour ne pas dire dans nos cauchemars.


Antonio Villas Boas (1934-1992)
Le 5 octobre 1957, à une heure du matin, un jeune paysan brésilien de profession, Antonio Villas-Boas, 23 ans, laboure nuitamment son champ, seul au volant de son tracteur lorsqu’il remarque une grosse étoile rouge dans le ciel sans nuage. Celle-ci se met tout à coup à grossir comme si, brusquement, elle se rapprochait. Bientôt, l’homme estime qu’elle se situe à environ 50 mètres au-dessus de lui, brillant avec éclat si bien que le sol tout autour est illuminé comme en plein jour.

L’instant de paralysie par la peur passé, Antonio ne songe alors qu’à fuir quand la coupole aplatie en forme d’œuf allongé, avec trois saillies métalliques (une au centre et une de chaque côté) et une pointe au sommet, descend plus bas encore vers le sol. Sous la machine, il y a quelque chose qui tourne à grande vitesse et une lumière phosphorescente rougeâtre s’en dégage au moment où l’engin amorce la manœuvre d’un lent atterrissage. Antonio tente désespérément de s’éloigner comme un animal effrayé mais le moteur du tracteur cale.




Scénario classique jusqu’à…

Antonio saute de son siège et prend les jambes à son coup quand il sent une pression sur son bras ; il se retourne et voit un petit être, sorti de la machine volante, maintenant posée sur un tripode, qui s’est lancé à sa poursuite. Le jeune Brésilien le repousse violemment et le nain tombe à terre. Mais le voilà qui reçoit le renfort de trois autres comparses de même taille pour maîtriser Antonio, le soulever du sol et l’obliger à monter à bord de la soucoupe par une échelle, l’ouverture se situant en dessous de l’engin.

Antonio, vaillamment, continue de lutter, se cramponnant plusieurs fois aux barreaux de l’échelle mais ils parviennent à l’emmener dans une petite salle carrée aux murs polis et argentés. La porte est refermée.

On le conduit manu militari dans une salle ovale plus grande dont les parois s’ornent d’inscriptions inconnues décrites comme des gribouillis marquées en rouge ; deux des figures le maintiennent encore tandis que les autres le surveillent « en grommelant comme des chiens » (sic). Antonio est sûr qu’ils discutent de lui. De grosses lunettes rondes dissimulent leurs yeux qui semblent cependant plus volumineux que les nôtres. Et ils portent un casque duquel partent trois tubes reliés à leur combinaison faite d’une matière grise épaisse.

Les grognements ayant cessé, on le force à se déshabiller totalement et il subit une prise de sang recueillie de sous le menton dans une fiole de forme tarabiscotée. Puis, au moyen d’une éponge mouillée, une des créatures lui humecte la peau. Désinfectant, déodorant, aphrodisiaque ? Antonio est laissé seul dans une salle du vaisseau dont une sorte de lit constitue l’unique pièce de mobilier. L’homme s’y allonge mais n’y reste que quelques instants car une violente nausée le prend causée par une sorte de vapeur à l’odeur de brûlé qui s’échappe de petits tubes émergeant du plafond. Réfugié dans un coin, il a du mal à retenir son envie de vomir.

A sa plus grande surprise, au bout de quelques minutes, il y a un bruit de porte et une femme (« bien que son apparence ne soit pas entièrement terrestre », sic) s’introduit dans la pièce et se dirige vers lui, un étrange sourire aux lèvres. Elle est toute nue, comme Antonio, et ses intentions sont clairement affichées. Ses cheveux sont blonds, presque blancs, ses yeux étirés en amandes, « comme les princesses arabes » (sic). Son visage se termine par un menton très pointu, ce qui donne à l’ensemble une forme triangulaire compte tenu de la grande largeur au niveau des pommettes.
Antonio, quelque peu estomaqué n’en est pas moins homme et il remarque le corps féminin mince, les seins haut placés et bien séparés, la taille fine, les petits pieds et les longues mains…

De quoi mettre en appétit un jeune gars de la campagne en parfaite condition physique. Mais pas au point de le rendre sexuellement incontrôlé comme il se retrouve, mettant cette excitation anormale sur le compte du liquide avec lequel on l’a badigeonné dont les vertus devaient être, selon lui, quelque peu aphrodisiaques.

Soupe aux choux à la hussarde

Le contact se fait en silence, sans ambiguïté. Antonio pense in petto qu’on lui demande de jouer le rôle de l’étalon dans quelque haras, mais cela ne lui coupe pas ses effets puisqu’il s’exécute de bonne grâce par deux fois, la belle étrangère répondant à ses assauts par de subtiles caresses et des grognements que certains traduiront par « aboiements canins », d’autres, moins romantiques, par « gémissements de truie » ! Antonio, dans l’action, tente d’embrasser sa partenaire sur les lèvres qu’elle a fort minces, remarque-t-il. En vain ! Selon Antonio, les bruyantes démonstrations de plaisir « gâchaient presque tout, car elles me donnaient la désagréable impression que j’étais avec un animal ».

Illustration tirée du livre de Lob & Gigi (1979), page 106.
L’acte à répétition consommé, la créature s’éloigne sans autre marque de sympathie et d’affection ; la porte est bientôt ouverte et un des « étrangers » appelle la femme qui, juste avant de disparaître, adresse à son partenaire un sourire et un geste jugé comme explicite : elle montre son bas-ventre et ensuite le ciel. Antonio comprend que la créature hybride, appelée à naître de cette union, est destinée à « revigorer leur cheptel » sur une autre planète.

Antonio se rhabille et deux êtres masculins viennent le chercher pour le conduire dans une autre salle où les trois autres sont assis sur des sièges pivotants grommelant tranquillement entre eux. Sur la table, un gros cadran qu’Antonio tente d’approcher pendant que les autres regardent ailleurs. Ils réagissent violemment et l’écartent, l’entraînent…

Quelques minutes plus tard, Antonio se retrouve dehors et il assiste au décollage de l’engin en direction du sud. Il est 5 h 30 : son aventure a duré plus de 4 heures.

Les séquelles

Antonio, l’amant d’une nuit de cette belle Barbarella descendue des cieux, retrouvera son tracteur intact et reprendra son labeur, comme si de rien n’était. Mais il gardera quelques séquelles de cette rencontre inopinée : nausées, perte d’appétit pendant un mois, si bien qu’il consultera un médecin pour des troubles cutanés, entre autres, ainsi qu’une somnolence tenace et anormale imputables possiblement à un empoisonnement par des radiations.

L’examen physique d’Antonio par un médecin fit apparaître sur sa peau, par ailleurs, de petites taches « hyperchromiques », une de chaque côté du menton ; des stigmates résultant de quelque lésion superficielle avec un saignement interne… « comme si la peau s’était reformée » sur l’endroit de la prise de sang.

En novembre 1957, son histoire va faire la une du magazine populaire O Cruzeiro ; c’est lui-même qui aurait alerté les journalistes des circonstances rocambolesques de son aventure. Selon l’un d’eux, sa sincérité ne fait pas de doute : « Nous n’avons pas affaire avec un cas de psychopathe, un mystique ou un sujet à des visions. Malgré cela, le fond de son histoire devient le plus lourd handicap en sa faveur ».

La nature particulière de cette expérience apte à choquer les gens prudes resta circonscrite à son pays d’origine (bien qu’il ait déjà raconté l’affaire à un chirurgien ufologue de l’Ecole Nationale du Brésil dès février 1958) jusqu’en 1962 où l’association ufologique américaine APRO (Aerial Phenomena Research Organization) crut bon de la médiatiser la qualifiant tout d’abord de « viol allégué d’un fermier brésilien par quelque créature femelle non inhibée (sic) venue de l’espace ». Le mot viol fut ensuite édulcoré en « séduction ».

Retenons qu’Antonio tira de cette extraordinaire rencontre l’occasion de se sortir de sa rurale condition. Devenu un avocat respectable et respecté en obtenant une licence en droit puis attorney, homme marié, père de quatre enfants, en 1978, A. Villas-Boas passa à la télévision brésilienne où il fut interrogé sur son incroyable aventure : il n’en dévia pas d’un iota y ajoutant un seul nouveau détail : le prélèvement de semence dans une éprouvette récupéré lors du deuxième acte sexuel.

Sa rencontre très, très rapprochée avec cette extraterrestre venue d’on ne sait où inspira au moins un canular avoué en 1967 ; mais fut-elle aussi à l’origine des visions ultérieures, par les victimes d’enlèvements présumés, de bébés-éprouvette alimentés par tuyaux et autres images qui font partie de l’ufologie fantastique ? C’est fort possible. Le déplacement aux Etats-Unis d’A. Villas-Boas au début des années 1960 alimenta la rumeur... Avait-il été invité par les ufologues ou par les autorités américaines en tant que premier « contacté physique » par une race étrangère arrivée et accidentée sur terre 10 ans plus tôt ?

Assista-t-on là, au Brésil en 1957, à un épisode contemporain d’un mythe qui perdure jusqu’à nos jours mais que d’autres font remonter à la Genèse biblique quand il est dit textuellement que, jadis, les filles des hommes se sont unies aux fils des dieux ? C’est précisément le contraire qui a eu lieu, près de la ville de Francisco de Sales, non loin de Sao Paulo, voilà 54 ans.

A. Villas-Boas a-t-il réactivé dans notre inconscient des images archétypales qui y sont enfouies ? C’est la thèse des psychosociologues, qui donnent ainsi, selon moi, dans la facilité. A-t-il, au contraire, cédé à une vision irréelle et onirique ? Antonio n’avait rien d’un déséquilibré pour tous ceux qui eurent à le côtoyer.

En définitive, le plus célèbre papa d’hybride – du moins se persuada-t-il comme tel, est mort discrètement en 1992 dans la ville brésilienne de Uberaba à l’âge de 58 ans, sans rencontrer sa progéniture ni revoir sa partenaire étrangère de 1 m 50. Du moins a-t-il jugé bon de ne pas nous en informer.


Arguments pour et contre et possibilités de confusion.

Le pour : l’apparente sincérité du témoin et les séquelles physiques subséquentes de son rapport consentant difficilement attribuables à une imagination même débridée.

Le contre : finalement, le peu d’impact psychologique qu’eut son aventure sur Antonio va plutôt en sa défaveur. On n’imagine tout de même une réaction plus immédiate et plus spectaculaire suite à un tel traumatisme. Il est vrai que l’ufologie brésilienne fourmille de détails sensationnels.


Possibilité de confusion :
Difficile d’en envisager une, même si d’aucuns pensent que le récit fantastique d’A. Villas-Boas aurait pu en rester au stade des fantasmes post-pubères ou de l’onirologie succube d’un jeune étudiant isolé, forcé aux travaux des champs par son père (J. Vallée y détecta « un symbolisme de conte de fées »).


Les précédents

Avec ce cas quelque peu scabreux, on aborde le sujet du rapport des ovnis avec le sexe ! Au risque de surprendre, dès le début, l’ufologie n’a pas craint d’afficher un tel lien ouvertement assumé au point que la monumentale encyclopédie de Jerome Clark y consacre un paragraphe entier.

Déjà en avril 1897, dans le Louis Post-Dispatch, un voyageur de commerce rapportait sa rencontre avec un couple de gens nus descendus d’un dirigeable sur les collines non loin de Springfield, au Missouri.

Un des premiers « contactés » américains, Howard Menger (1922-2009) prétendit, avoir fait des « rencontres », dès 1932 (il avait 10 ans !), avec des extraterrestres de sexe féminin, dont « une fille magnifique, en tenue de ski » (sic) qui lui avait avoué être vieille de 500 ans !

En 1956, il épousa en secondes noces une blonde prénommée « Marla » qui, d’après lui, venait d’une autre planète. Sous le nom de Connie Weber, elle écrivit et publia en 1958 un livre intitulé « Saturnien, mon amour… » !

Deux ans plus tôt, une Australienne prénommée Sonya prétendit avoir visité la planète Saturne et y avoir rencontré des êtres plus actifs sexuellement que les Terriens ! 

Dans les années 1965-70, comme le phénomène des enlèvements commençait à poindre, de nombreuses femmes s’en prétendant les victimes soulignèrent les connotations sexuelles des rencontres avec les « ufonautes » : examens intimes, inséminations et même actes sexuels.

En 1976, un vacher colombien fit état d’une étrange impulsion qui le poussa à sortir de chez lui pour assister à l’atterrissage d’un vaisseau lumineux en forme d’œuf de poule d’où sortirent une bande de joyeuses créatures hautes de 1,5 m, au visage plat et yeux protubérants, dont trois femmes complètement nues qui adoptaient des postures d’invite provocatrices. Il eut un rapport sexuel avec l’une d’elle et remarqua que son ventre était dépourvu de nombril.

En 1980, une femme sud-africaine affirma avoir une romance avec un savant de la planète inconnue Meton et avoir eu avec lui une union magnétique d’essence divine qui l’avait amenée à l’extase (orgasme ?).

On pourrait multiplier ce genre d’exemples érotico-ufologiques dont les annales sont remplies, mais sautons aux abductions actuelles dont certains détails constituent la version hard de ces vieux récits.

C’est ainsi que depuis que de véritables études universitaires se sont penchées sur la question (elles datent de 10 ans à peine et sont peu connues), on y a découvert une profusion d’actes sexuels dont certains à caractère pornographique et, plus graves, des agressions qui entrent carrément dans la catégorie des viols, voire de la pédophilie. Actes répréhensibles décrits avec complaisance par les témoins et racontés par ceux qui exploitent ces histoires sous couvert de contacts intersidéraux alors qu’il s’agit plutôt de secrets d’alcôve. Une dérive qui, en tout cas, n’est pas bonne pour l’ufologie déjà malmenée par beaucoup d’incompréhension de la part de ceux qui soutiennent encore, comme moi, que son principal objet, les ovnis, est un phénomène extérieur à l’individu et non un fantasme ou une affabulation psychologique ou pathologique.



Publié dans LE MONDE DE L’INCONNU, n°351, août-septembre 2011.



















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