vendredi 18 novembre 2016

Mutilations d’animaux en Suisse


Souvenez-vous, dans ma chronique du 4 septembre dernier (2005), sur l’actualité insolite de l’été, je vous signalais des mutilations d’animaux en Suisse ; le coupable présumé dénoncé par les médias n’incitait pas à trop faire de commentaires. Dans le journal suisse Le Matin du 8 août, on pouvait lire, en effet, « Zoophile sadique, la vague de cruauté se poursuit. Cinquante victimes à son tableau de chasse ! »

Il semblait donc s’agir des méfaits d’un désaxé sexuel helvète à forte pulsion hormonale qui, après avoir forniqué avec quelques bestiaux, s’en prenait à eux avec cruauté pour les taillader, parfois à mort. Une source Internet, parlant du cas d’un mouton décapité, précisait que le sadique s’était livré à un accouplement contre nature sur le cadavre de l’animal !

L’éveil de mon intérêt concernant d’éventuelles mystérieuses mutilations de bétail en Suisse, était donc vite retombé du fait de cette explication sordide. Et tout en serait certainement resté là si je n’avais pas reçu, fin septembre, un courrier de mon éditeur, JMG, me répercutant une lettre de Mme Renée Maier, de Lausanne. Une lectrice de mon « Grand Carnage » et de sa mise à jour intitulée : « Mutilations de bétail en Amérique et ailleurs… 30 ans de mystère extraterrestre ? », sortie en 2003, qui, fort aimablement, tenait à ma disposition un dossier de presse sur ces fameuses mutilations animales en Suisse !

Ah des lectrices comme ça, croyez-en mon expérience d’écriture qui dure depuis plus de 30 ans, on n’en rencontre pas souvent. Si bien que je me suis vite retrouvé avec un copieux dossier de coupures de journaux indiquant que les prolongements à l’affaire du sadique méritaient, cette fois, une grande attention car l’ampleur du phénomène des blessures sur une cinquantaine d’animaux dans les cantons du Nord Ouest de la Suisse dépasse largement les capacités de nuisance d’un pervers, fût-il suisse !

Mais la thèse du sadique avait déjà du plomb dans l’aile du fait de sa capacité à échapper à la police. « Le zoophile existe, je ne l’ai pas vu », titrait le Matin Suisse du 29 septembre, parlant finement d’une psychose qui avait accouché d’une souris.

En fait, la police neuchâteloise, qui n’avait pas lésiné sur les moyens d’enquête (1200 jours de travail et un million de francs suisses de dépense), en était arrivée, ayant fait choux blanc, à la conclusion que le mystérieux sadique zoophile n’existe pas et que le tout ne serait que la manifestation d’une légende rurale (Tribune de Genève du 26/09) colportée par la rumeur ayant fait irruption cet été en Suisse Romande et Alémanique.

Bien sûr, à ce prix là, il a été facile de trouver des preuves de l’action naturelle de  prédateurs, notamment sur un âne retrouvé mort, dans le Val-de-Travers (ça ne s’invente pas), et émasculé. Dans une courte émission de la télévision suisse normande TSR, intitulée « De mal en pis » (qui disait que les Suisses n’ont pas d’humour ?), diffusée le 9 octobre et que Mme Maier m’a permis de visionner sur bande VHS, M. Olivier Guéniat, chef de la Sûreté neuchâteloise, affirme que le sexe de l’animal a été emporté et non mutilé ! Une nuance qui fait basculer l’acte de la catégorie d’actes barbares imputables à l’homme à l’action prédatrice nécrophile d’animaux carnivores tel le renard sur des bêtes mortes naturellement. Une manœuvre dilatoire très prisée quand on ne trouve rien ! Un discours maintes fois entendu dans les milliers de cas suspects qui se sont produits en Amérique depuis les années 1960. En tout cas un moyen de faire retomber la tension car celle-ci avait tendance à devenir dangereuse avec des fermiers, qui impatients de voir le sadique arrêté, avaient organisé des surveillances et des patrouilles avec envie de se faire justice eux-mêmes s’ils prenaient sur le fait le monstre des alpages (Le Dauphiné Libéré du 6 octobre).

L’âne est mort d’une crise cardiaque, écrivait le Nouvelliste du Valais. Celle-ci a dû être d’une violence inouïe puisque l’animal s’en est trouvé lévité dans le champ voisin, tel que souligné par Mme Maier qui, tout comme moi, ne voit pas, dans cette explication banalisée et apaisante, l’expression de la vérité.

« Ce n’est pas parce qu’il y a un certain nombre de maltraitances chaque année que ces mini-mutilations relèvent du même phénomène », m’écrit-elle.

La Suisse, après avoir vu naître la vache violette avec le stigmate d’une marque de chocolat sur le dos, vient-elle de signaler le premier âne volant ? Quant à l’expérience nocturne destinée à voir si les prédateurs suisses sont si affamés que cela – un petit veau sacrifié livré à ces bêtes sanguinaires, ceci sous l’œil de caméras infrarouges d’une acuité suisse – elle a lamentablement foiré. Ces prédateurs sont plus malins que les autorités, ils savent faire la différence entre un appât bien apprêté et un âne innocent dont le proprio se lamentait que la perte allait priver de distraction une ribambelle de jeunes cavaliers !

Quoi qu’il en soit, nous allons continuer à suivre les développements de cette affaire, sachant qu’en la matière la part émotionnelle causée sur les populations n’a qu’un équivalent : l’embarras dans lequel elle plonge les autorités confrontées à quelque chose qui, pourtant, ne relève pas d’une intervention extraterrestre, il faut bien en convenir. Dommage, ça les arrangerait bien…


Publié (sans la photo) dans DIMANCHE Saône & Loire du 18 décembre 2005 et dans  UfFOMANIA, N° 46, mars 2006.


Pis "mutilé".





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