dimanche 20 mars 2016

Que s’est-il passé le 5 novembre 1990 ?



« La vague d’ovni la plus colossale connue en France à ce jour », selon certain.  « Une rentrée atmosphérique du satellite qui explique 95 % des observations au moins », d’après un autre !

En tout cas, les témoins se sont comptés par milliers. Et cette affaire n’a jamais généré un épilogue consensuel.


Deux ufologues français, chacun de leur côté et à 6 ans d’intervalle, y ont consacré un petit ouvrage ; ils personnalisent les deux extrêmes qui s’opposent pour donner une interprétation de ce qu’on a pu voir dans le ciel clair, en ce lundi 5 novembre 1990, à 19 heures tapant. L’un, Didier, est responsable de la publication du bulletin UFOMANIA Magazine ; l’autre Robert, faisait partie de l’association marseillaise du CERPA (Centre d’Etudes et de Recherches sur les Phénomènes Aérospatiaux). Cette association a malheureusement disparu depuis plusieurs années de la scène ufologique et je ne sais pas ce qu’elle est devenue. Tous les deux manifestent la même sincérité, la même rigueur, pour défendre leurs convictions par rapport à ce qui s’est passé. Ces deux opinions opposées méritent respect et considération puisqu'elles cherchent à discerner la vérité.

Selon Didier, c’est une « fâcheuse coïncidence » que cette apparition quasi simultanée entre d’authentiques phénomènes de type ovni et une rentrée satellitaire. Pour Robert, c’est une grave atteinte à la crédibilité du témoignage humain qu’apporte cette mémorable nuit où de nombreux témoins ont confondu une désintégration spatiale à 100 km d’altitude avec une flottille d’ovnis volant bas. Deux avis divergents qui finalement se rejoignent à la manière du verre à moitié vide et du verre à moitié plein.

Ni l’un ni l’autre ne conteste qu’en cette soirée, voilà 11 ans, par une nuit étoilée, sans lune, la France fut traversée d’Ouest en Est, de Bordeaux à Strasbourg, par « des masses lumineuses immenses et silencieuses » laissées par le frottement dans l’atmosphère des débris spatiaux de désintégration du 3ème  étage d’une fusée Proton soviétique, constituant un spectacle inoubliable pour tous ceux qui y assistèrent. Là où ils sont en désaccord, c’est sur un tout petit nombre de témoignages (l’écume de la vague Robert dixit) qui peuvent être interprétés soit comme une manifestation extraterrestre en action de camouflage (Robert), soit comme une « interférence d’une autre nature » (Didier). Car, c’est là où réside tout le sel de la confrontation de ces deux approches : Robert, « le debunker » croit certainement beaucoup plus à l’hypothèse extraterrestre comme cause des ovnis que Didier (le croyant) qui y voit « autre chose de radicalement différent et de bien plus complexe ». C’est la « cohérence globale » du phénomène qui incite Didier à discerner une « manifestation intelligente » tandis que Robert envisage, du bout des lèvres, que cette « rentrée », en avance sur les prévisions de la NASA et vraiment trop bien orientée, pourrait provenir du fait que « les ET lui auraient donné un coup de pouce pour que l’étage de la fusée traverse par le milieu un pays entier à l’heure où il peut être observé dans les meilleures conditions par un maximum de témoins » !

Chacun argumente pour étayer sa thèse, mais là aussi il y a contraste entre la mesure de Didier qui ne retient que 9 témoignages somme toute pas si extraordinaires que ça : notamment les lumières qui réagissent à l’appel de phare d’une mobylette deux jours avant le 5 novembre, un triangle style « plate-forme » belge dont les phares éclairent le sol et un objet qui, entre 19 h et 19 h 15, survole un témoin près d’Evreux et soudain « change de direction en accusant un virage de 90 degrés dans le sens des aiguilles d’une montre laissant entrevoir une des deux faces ». Et Robert qui va jusqu'à la mauvaise foi en arguant du fait que le bruit de ventilateur rapporté par un témoin qui l’a rendu sourd est « une impression de surdité provoquée par l’absence incompréhensible de bruit » !

Didier profite de son petit livre pour nous exposer sa réflexion sur la possible nature du phénomène ovni. Il écrit que les ovnis ne semblent exister que par rapport à nous, ce qui me paraît fort juste puisque nous en sommes les observateurs. Il s’agirait, à son sens, d’une manifestation d’une certaine forme d’intelligence, une structure vivante qui surveille notre monde depuis des siècles et des siècles en le dirigeant à sa guise sous forme d’apparitions qui évoluent suivant les populations, les lieux, les époques. « Une Supra-Intelligence, une prodigieuse puissance de manipulation des esprits ». Et de terminer par cette question : « Est-ce Dieu ? la gardienne de nos âmes ».

Une vision revigorante de la problématique ovni qui devrait vous inciter, si le sujet vous interpelle, à vous procurer ce petit opuscule de 143 pages à l’adresse ci-dessous pour le prix de 119 francs.


Références :
*Didier Gomez, L’EURE des OVNIS, 5 novembre 1990, 19 h, C. LACOUR Editeur, Place des Carmes- 25 bld Amiral Courbet, 30000 Nîmes.












*Robert Alessandri, 5 novembre 1990 : le creux de la vague, CERPA, BP. 104, 13363 Marseille.

 




Depuis, R. Alessandri a complété son dossier sur les événements du 5 novembre 1990.

Voir : http://perso.numericable.fr/r.alessandri/ufologie/5novembre40cas.html.


Publié dans UFOMANIA, N° 31, décembre 2001.


Dans ma chronique sur l’actualité de l’Etrange publiée régulièrement à cette époque dans DIMANCHE Saône & Loire,  « à chaud » en date du 3 mars 1991, soit 10 ans plus tôt, j’écrivais ce qui suit.


L'ovni du 5 novembre

Le 5 novembre dernier vers 19 heures un phénomène lumineux traversa le ciel d'Ouest en Est.

« Un ovni dans le ciel chalonnais ? » titrait, le lendemain, votre journal préféré faisant état de témoins à Chalon ­même et à Farges (« un triangle isocèle la pointe en avant », était-il précisé, altitude évaluée à 500/700 mètres et vitesse de 150 km/h), puis plus tard, à Autun, Auxerre, Troyes, Orléans, Limoges, Tulle, Me­lun, Evreux, Lyon, Niort et Bordeaux.

Cela correspondait bien à ce que j'avais entendu à la radio, conduisant mon fils à la gare peu après 19 heures : à savoir une lumière aérienne signalée depuis la côte atlantique.

Courrier de S. & L. du 6 novembre 1990.
En fait, il y avait eu des milliers de témoins non seulement en France, mais en Italie, en Suisse et en Belgique. Sur mon lieu de travail, il se trouva au moins trois personnes (1/100) à avoir vu quelque chose. En fait les descriptions variaient de boules orange multicolores (vues à Genève) à 3 à 6 points brillants de lumière (objets en formation ou simple objet éclairé en divers endroit ?).

Dès le 7 novembre les esprits s'échauffaient : était-ce l'observation indiscutable que l'on attendait depuis 40 ans ? Charles Garreau, interrogé une fois de plus, répondait - comme d'habitude - qu'il
se refusait « à tirer une conclusion hâtive ». De même, le service d'expertise des phénomènes de rentrée atmosphérique (SEPRA, ex-GEPAN), par, la voix de son inénarrable directeur, recourait à la fameuse formule : « Il n'est pas possible de se prononcer ».

C'est alors qu'un porte-parole de l'Observatoire Astronomique de Munich annonça qu'il s'agissait « indubitablement » de l'explosion d'une météorite. Nonobstant les points brillants, la vitesse apparente, la basse altitude... Et promettant des précisions jamais venues.

De qui se moque-t-on ?

Courrier de S. & L. du 10 novembre 1990.
Le SEPRA, pour sa part, remplissait la mission pour laquelle il est payé : le Service d'Etudes des Phénomènes de Rentrées Atmosphériques concluait que « c'était une fusée russe » (Proton) rentrant dans les couches denses de l'atmosphère terrestre (lanceur du satellite de communication Gorizont 21). Fi de la redondance ! Il valait mieux deux explications qu'aucune.

Quelques objections furent bien émises mais elles n'eurent guère d'écho dans la presse, laquelle se rallia lâchement à la thèse officielle en l'agrémentant d'un couplet sur les Martiens : leur débarquement était encore provisoirement reporté ! Formule éculée qui ne fait rire que les journalistes, puisque aucun ufologue sérieux aujourd'hui ne défend plus l'origine martienne des ovnis.

Quant à certains témoins, ils convinrent que l'explication du CNES pouvait correspondre à ce qu'ils avaient vu (cf. un collègue de travail).

En ce qui me concerne, j'avais du mal à concilier la version du SEPRA avec le témoignage d'un pilote d'Air France, en vol à destination de Barcelone, interviewé sur Europe 1 le 16 ; il avait vu à 19 h 03, « un objet de forme trapézoïdale avec une douzaine de lumières très distinctes allant du vert au jaune en passant par l'orange et surtout une grosse lumière plus importante, derrière laquelle il y avait une traînée de condensation... « Météorite déjà enguirlandée pour la Noël ou rentrée atmosphérique exotique ?

Comme je ne suis pas un spécialiste, je devais me fier à ceux qui se prétendent comme tels.

Ce qui clôtura ma chronique de la semaine.

Depuis, on a constitué des dossiers des coupures de presse au sujet de cette observation du 5 novembre 1990. Ainsi peut-on constater que l’occasion avait été donnée pour un festival de bons mots utilisés par certains journalistes. En voici quelques-uns datant du 7 novembre :

-          bien sûr, le classique « Ovnis soit qui mal y pense », bizarrement orthographié par Le Courrier Picard,
-          le non moins classique : « Des OVNI comme s’il en pleuvait » de Ouest-France,
-          Le « Ciel, des O.V.N.I. ! du meilleur effet par Le Dauphiné Libéré,
-          « Quand pleuvent les ovnis » du Figaro, montrant une grande inspiration de la rédaction !

Sud-Ouest du 9 novembre révélait que Jean-Pierre Petit avait affirmé : « Bizarre, Bizarre… », refrain hautement éclairé repris par Le Progrès du 9 novembre avec l’avant-titre : « Armée d’ovnis dans le ciel d’Europe » et un dessin de DuBouillon.



Et on s’étonne aujourd'hui en 2016 que l’ufologie soit tombée en discrédit. Mais les médias ont largement contribué à cette déconfiture.

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