samedi 23 mars 2024

 

La médecine de l’habitat : ça existe !



Certaines maisons, bien confortables par ailleurs, sont-elles dangereuses à habiter ?


Cette villa, où vous logez, est-elle, d'une certaine manière, responsable des ennuis de santé qui vous touchent, vous et votre famille ? Ce trois pièces-cuisine avec balcon, dans lequel vous avez investi vos économies, peut-il être vraiment délétère, c'est-à-dire suspecté d'altérer votre état physiologique, corporel ou psychique ?


A ces questions que je me posais depuis la publication de plusieurs études sur ce sujet, Claude Saccaro, radiesthésiste à Villeneuve-en-Montagne, près de Buxy, est venu me répondre positivement.


En ce samedi de novembre, il a débarqué chez moi, chargé de sa trousse remplie d'objets hétéroclites, de sa panoplie d'exorciste du bâtiment et surtout - à mon sens - de sa vitalité débordante, de sa joie de vivre communicative et aussi - ce qui est rare dans la profession - de son humilité de bon aloi.


« Je ne fais aucun miracle, m'a-t-il déclaré. Inutile de me consulter pour ramener le mari volage dans le lit conjugal ni pour me faire cracher les bons numéros du prochain tirage du loto...


« Au niveau de la radiesthésie, nul ne peut prétendre tout réussir. Nous avons tous encore tant à apprendre.


« Bien au contraire, je ne suis rien… qu'un instrument de la nature, apte à rétablir l'équilibre entre le lieu d'habitation et ceux qui doivent y vivre et s'y sentent mal...


« La plupart du temps, le trouble provient d'ondes nocives émises par certaines particularités du sous-sol : cours d'eau souterrains, failles géologiques, minerais, poches souterraines, anciens remblais, etc.


Les agressions continuelles engendrent des perturbations au niveau des cellules et la disharmonie vibratoire s'installe. Hommes, femmes, enfants, animaux, plantes, voient, suivant leur résistance, leur santé disparaître au fil des jours... Ainsi, il n'est pas rare de constater chez des personnes victimes d'ondes nocives le phénomène appelé « insomnie », que ni les somnifères, ni les conditionnements mentaux n'arrivent à vaincre. Il est le premier stade pendant lequel l'organisme s'affaiblit et s'épuise... »


Bien que travaillant parfois à distance avec succès - comme en attestent plusieurs lettres qu'il me montre - C. Saccaro se veut un homme de terrain. A votre appel, il accourt avec son attirail de parfait petit « rééquilibreur » non diplômé (ni hélas reconnu par la Sécurité Sociale).


Son intervention consiste à utiliser des moyens physiques pour bouter lesdites ondes nocives hors de chez vous, comme un dératiseur vous débarrasserait des nuisances dues à la gent ratière.


Pour cela, il utilise soit un neutralisateur d'ondes nocives, en bois, instrument commun dans le métier, mais qu'il a construit de ses propres mains ; soit il effectuera un « cerclage » de votre bâtisse en la ceinturant d'un cordon spiralé parfaitement calibré.


« Ne pas jouer aux apprentis sorciers en .voulant faire cela tout seul, m'a-t-il fait comprendre. Le sens des spires ainsi que leur nombre dépend du cas de figure envisagé. Si on se trompe, l'effet peut être inverse et catastrophique. Réservez s'il vous plaît le diagnostic à un spécialiste... »


Mais comme pour tout équilibrage, l'action doit se faire à deux niveaux : sur le local bien sûr, mais il faut aussi réparer les dommages infligés par l'exposition plus ou moins longue aux émanations pernicieuses.


Pour cela, C. Saccaro cherche à agir sur la matière et l'énergie de notre habitant « intoxiqué » par son domicile. « Ne sommes-nous pas constitués essentiellement d'énergie et de matière ? » Dans ce but, il se livre à une détection par radiesthésie des carences d'oligo-éléments du « malade », ces sels minéraux en mini-doses dont la présence, même en quantités infimes, est indispensable aux mécanismes vitaux. En connaissance de cause, il suggère donc un léger changement diététique propre à reconstituer un bon état de santé. « Bien dans sa maison, mais aussi bien dans sa peau, l'un n'allant pas sans l'autre ».


D'après mon interlocuteur, il n'a enregistré aucun échec à ce jour ce qui ne veut pas dire qu'il n'en aura pas dans l'avenir. Pour étayer ses dires, il me fait lire un certain nombre de témoignages de ses « patients » qui louent sa consultation et ses remèdes. « Notre fils s'endort beaucoup mieux, écrit M. X. Je me lève le matin enfin satisfait d'avoir passé une bonne nuit. Je marche allègrement, précise M. Y. Mon stress a aussitôt baissé, après votre « cerclage » ajoute M. Z ».


Bien que, selon son expression, « son carburant, ce soit l'amour et la santé des autres », à ma demande concernant le montant de ses émoluments, il me répond sans détour qu'il n'est pas gratuit. « Il faut bien vivre tout de même ». Mais ses prestations restent raisonnables. ll fait de la radiesthésie « accessible à tout le monde ».


A ce propos, il met en garde contre les appareils miracles, hors de prix, qu'on trouve dans le commerce et qui, suivant la notice, vous transforment « votre appartement en paradis ». Contrairement aux vendeurs de tels gadgets, qui n'assurent ni la pose de l'appareil correcteur, ni son service après-vente (sic), C. Saccaro 'suit ses « clients » et il lui est arrivé d'être appelé et de réussir là où la machine avait été inopérante.


Enfin, il a voulu que je mentionne qu'en aucun cas, il ne prescrit un déménagement. Ni un bouleversement complet de votre mobilier. Quant à la réceptivité psychique des habitants, elle n'est même pas nécessaire. Qu'on y croie ou qu'on n'y croie pas, les ondes nocives agissent sur tout le monde ; l'épuisement est garanti, il dépend de la résistance des gens...


Au terme de notre entretien, C. Saccaro m'a confié qu'il attendait un peu de publicité de notre rencontre. Je la lui fais volontiers d'autant que sa compagnie m'a été fort agréable et elle ne restera pas, je l'espère, sans lendemain.


Je ne me prononcerai pas sur ses techniques de conjurations des maléfices de l'habitat ; ça, je l'en ai prévenu et il l'a accepté comme tel. S'il peut, pour une somme modique en définitive, soulager certains résidents de leurs affres ou de leurs fatigues en agissant indirectement sur leur logement, c'est une manière qui en vaut d'autres d'aider ses contemporains dans le désarroi.


On aurait tort d'ailleurs de rejeter cette idée de maisons funestes au rang des créations factices de l'occulte. Le très sérieux bureau britannique de protection contre les radiations n'a-t-il pas reconnu, récemment, que 5 à 10 % des cancers du poumon pourraient bien être provoqués par le radon - gaz radioactif - s'échappant des murs de pierre granitique de plus de 2.000 maisons anglaises ? On a trouvé, en effet, que certaines bâtisses en contenaient dix fois plus que le seuil où il cesse d'être inoffensif...


Les « maisons à cancer », ce n'est peut-être pas aussi stupide qu'on a bien voulu le dire ?


Publié dans LE COURRIER DE S. & L. DIMANCHE du 12 janvier 1986.

mercredi 21 février 2024

 

Vivons-nous dans un univers à dimensions multiples ?


La quatrième dimension est-elle une réalité ? Et la cinquième... ainsi de suite ?... Il semble qu’en ce domaine, la science entérine la fiction et la devance largement.


A la séance de lancement d’un concours de nouvelles de science-fiction de l’Atelier de Création littéraire de Bourgogne, il y a un peu plus de 2 ans, je m’étais retrouvé, à la tribune, à droite de Pierre Barbet, auteur représentant l’école française du genre.

A cette occasion, j’ai dû constater, notamment au sujet de la théorie des univers parallèles, que l’imagination de ces champions avérés en la discipline était aujourd’hui prise de vitesse par les progrès de la science, du moins en théorie si ce n’est en pratique.


La science-fiction à la remorque.

Pourtant, ce sont bien ces écrivains de l’imaginaire qui ont exploité à satiété l’idée d’une quatrième dimension, voire d’une cinquième, et les noms qui me viennent à l’esprit, sans aucune idée de classement, sont Barjavel, Guieu, Klein, Curval, Caroff, Richard-Bessière mais aussi Maurice Renard, Marcel Thiry, Léon Groc et Raoul Bigot.

Or, tous me paraissent aujourd’hui complètement dépassés lorsque, par exemple, Jacques Vallée - alias Jérôme Sériel comme auteur de SF et aussi grand scientifique - annonce, le plus sérieusement du monde, que notre univers pourrait bien avoir 136 dimensions, se fondant certainement sur les avancées récentes de la physique théorique.

Le concept que notre monde compterait des dimensions supplémentaires cachées est relativement récent, bien que figurant en filigrane dans certains textes orientaux antiques. Le britannique Henry More (1614-1687) en est reconnu comme l’inventeur au 17ème siècle, lorsqu’il conféra aux esprits des morts une qualité occulte, « épaisseur de la substance » qu’il appela « spissitude ». Sa pensée profonde influença Newton lui-même.

Il est vrai que l’hypothèse extra-dimensionnelle demande un effort d’abstraction certain que je vais tenter de vous épargner, dans la mesure du possible évidemment.


Notre monde a déjà quatre dimensions

Selon notre expérience de tous les jours, combien la nature semble-t-elle avoir de dimensions ? Je dis bien « semble ». Trois ? Quatre ? Un moyen simple d’obtenir la réponse est de compter les degrés de liberté dont nous jouissons nous-mêmes.

Un ami vous téléphone pour convenir d’un rendez-vous. Quels renseignements doit-il vous donner pour que vous puissiez vous rencontrer ? Premièrement, l’endroit choisi. Pointez sur le plan de la ville la mairie, par exemple : H 13. Selon le quadrillage de votre guide, ces deux coordonnées vous indiquent OU vous rendre. Mais est-ce suffisant pour réaliser la jonction désirée ? Non. Car si vous le cherchez au rez-de-chaussée et qu’il vous attende à l’étage, le contact peut être problématique. Ainsi, spatialement, il vous faut fixer 3 coordonnées, selon les 3 degrés de liberté de notre espace commun : latitude, longitude, altitude. Un objet peut se mouvoir à droite/gauche, au nord/sud, en haut/bas. Notre monde a bien trois dimensions.

A partir de là, le tête-à-tête est-il inéluctable ? Pas sûr. Il manque une donnée essentielle: QUAND ? Votre ami vient-il aujourd’hui ou demain ? C’est fondamental pour ne pas vous poser un lapin. Ce degré de liberté de plus amène, derechef, une dimension supplémentaire. Faites le compte : pour un événement à un endroit donné, à un moment donné, trois dimensions d’espace + une de temps; ça fait quatre.


La quatrième dimension, c’est le temps.

Le temps a pris figure, définitivement, de 4ème dimension depuis que Einstein, avec la révolution relativiste, lui a dévolu une part entière dans le continuum espace/temps.

En termes scientifiques, le sentiment de l’écoulement du temps, du passé vers le futur en passant par le présent, de l’avant vers l’après via le maintenant, n’est qu’une impression subjective, une illusion de nos sens comme l’enseignent depuis longtemps certaines doctrines mystiques. Nous sommes chacun un élément d’un univers-bloc à quatre dimensions indiscernables en théorie les unes des autres et, à ce titre, nous en constituons « une forme permanente et immuable ».

Je sais qu’il y a là une subtilité difficile à saisir - je vous avais prévenu - et ce n’est pas dans la place qui m’est impartie ici que je peux espérer éclairer ceux qui, hélas, ont décroché.

Si la théorie de l’espace-temps retient votre attention, je vous recommande le livre de Rudy Rucker « La quatrième dimension », publié au Seuil en 1985. Il consacre trente pages à ce sujet passionnant et dans un style très accessible.

En revanche, il escamote presque totalement les extraordinaires hypothèses selon lesquelles il y aurait, non seulement une, mais deux dimensions temporelles. C’est l’écrivain anglais J.W. Dunne qui, dès 1927, suggéra cette possibilité fascinante et celle-ci a été reprise en 1965 par le philosophe et mathématicien H.A.C. Dobbs. De cette manière pourrait-on expliquer les prémonitions, les coïncidences en fournissant une base rationnelle à la synchronicité.

Mais plongeons maintenant dans les autres dimensions spatiales qui peuvent exister à notre insu tout autour de nous. Et pour rendre cela compréhensible, je vais devoir recourir à une méthode qui a fait ses preuves : l’analogie.


Terreplate, terreligne et hyperespace

Moins connu que Einstein, mais peut-être tout aussi génial, est Adwin A. Abbott, un théologien anglais du siècle dernier qui, en marge d’une œuvre classique, publia en 1884 un opuscule devenu la Bible pour tous ceux voulant développer momentanément un « sens » de pensée multidimensionnelle. Son titre: Flatland : le Pays Plat.

Il ne s’agit pas de celui de Jacques Brel mais d’un monde fictif à deux dimensions - longueur et largeur - seulement, habité par des créatures extra-plates puisque totalement dénuées d’épaisseur !

A travers la satyre sociale de l’époque victorienne - échelle hiérarchique fonction du nombre de côté de ces figures plane où la femme se présente comme un « charmant » segment (le sexe maigre), les militaires et les enseignants en des triangles très pointus et la classe supérieure en polygones, le cercle étant le Roi - se dessine une théorie mathématique extrêmement ingénieuse. A l’aide d’analogies simples, Abbott nous amène à comprendre que nous pouvons très bien n’être, sans le savoir, que la « surface » tridimensionnelle d’une réalité quadridimensionnelle. Comme un Carré - le héros du Plat Pays - est l’intersection d’un plan avec un cube ou un segment celle d’un carré avec le Pays de la Ligne, à une seule dimension.

Pour imaginer cet espace à quatre dimensions (hyperespace), il suffit d’ajouter un quatrième degré de liberté correspondant à l’alternative ana/kata (équivalent quadrimensionnel de haut/bas) et de se représenter un hypercube à 16 coins et 24 faces, une hypersphère constituée d’une série de sphères devenant de plus en plus petites à mesure que l’on s’éloigne dans la direction ana ou kata etc. Une aubaine pour l’inspiration vagabonde.

Par le biais du jeu subtil de l’esprit, on entre, sans s’en rendre compte, dans le champ abstrus des géométries « exotiques ».


Géométries « différentes »

Et ceci, sans avoir à s’emmêler les neurones et risquer l’attaque cérébrale en passant par les formules compliquées de Riemann, Lobatchewski, Bolyai et Cie. Pourtant, le résultat est tout aussi étonnant quand, dans l’espace courbe de Riemann, la somme des angles d’un triangle est supérieure à 180 degrés et lorsqu’un coin d’hypercube de Abbott est constitué de quatre plans se coupant tous, les uns et les autres, à angle droit !

Seule la pédagogie change. Abbott a choisi l’analogie avec un habitant de Terreplate « évangélisé » par une sphère de dimension supérieure. Et ce Carré rampant m’est autrement sympathique que l’analyse non orthogonale. Chacun ses goûts, n’est-ce pas !

Croyez bien qu’il n’est pas dans mes intentions d’être irrévérencieux envers ces grands mathématiciens inspirés, créateurs des géométries dites non euclidiennes. Leurs travaux fondés sur des données hypothétiques et des nombres abstraits, après avoir été considérés comme pures spéculations intellectuelles, se révèlent aujourd’hui des outils indispensables à notre compréhension des univers parallèles.

Car, depuis peu, on s’est aperçu que les lois qui régissent l’univers ne sont pas les mêmes que celles qui conditionnent notre planète. Et, en particulier, au niveau microscopique, il semble bien que la physique des particules soit vraiment multidimensionnelle.


Supercordes et dimensions multiples

Selon les spécialistes, en effet, notre réalité subatomique aurait bien des dimensions spatiales supplémentaires. Et pas moins de six aux dernières nouvelles! C’est ce que sous-tend la fameuse théorie récente du « superstring », qui n’a rien à voir, je le déplore Messieurs, avec un affriolant dessous féminin en dentelles, mais constitue le nec plus ultra actuel en terme de modèle théorique constitutif de la matière. Je ne vais pas entrer dans le détail, rassurez-vous. Sachez cependant que si cela est vrai, y compris nous et les êtres invisibles, résultons du mouvement de petites cordes qui se meuvent et se tortillent dans un espace à 9 dimensions: trois étant celles que nous connaissons et les 6 autres s’étant recroquevillées sur elles-mêmes, « compactées » mais réelles.

Quel auteur de science-fiction aurait osé un tel délire ?

Et on n’en est peut-être qu’au début. Déjà certains avancent un nombre de dimensions compactées de 26 dans les supercordes et même de 950 ! Là encore les mathématiciens ont pris les devants. Hilbert n’a-t-il pas développé une théorie d’espace à une infinité de dimensions ?

Quelles conséquences cela a pour nous me direz-vous ? Eh bien ces dimensions cachées ouvrent les portes des univers multiples, parallèles, coexistant à l’infini avec le nôtre. Dieu vivant, qui sait, dans le dernier de ceux-ci. Chacun de nous serait l’ombre 3-D de quelqu’une d’une dimension supérieure et ainsi de suite jusqu’à l’infini. Nous serions tous l’ombre de Dieu en quelque sorte ou alors des créations objectivées de ses rêves.

Comme l’écrivait P.D. Ouspensky déjà en 1908: « Si la quatrième dimension existe alors que nous n’en possédons que trois, cela signifie que nous n’avons pas d’existence réelle et que nous n’existons que dans l’imagination de quelqu’un ».

Qu’en pensez-vous, mes biens chers Frères ?



Publié dans Le COURRIER DE SAÔNE & LOIRE DIMANCHE du 18 mars 1988.

samedi 9 décembre 2023

 

E.S.P (perception extrasensorielle) ou fonction PSI ?



« Il existe chez certaines personnes des facultés psychiques supranormales, leur permettant de pénétrer avec effraction dans le passé ou le présent de leurs semblables. » Par ces mots, le docteur Albert Leprince (1840-1914) (1) reconnaît la réalité intrinsèque, immédiate et concrète d’une puissance résidant hors des frontières sensorielles habituellement admises. Or nous avons évoqué bien des fois l’évidence courante qui stipule la grossièreté de nos sens, « si l’on compare la somme de ce qu’ils nous transmettent à la masse probable de ce qu’ils sont incapables de recevoir ».

Donc, existerait-il une classe d’êtres privilégiés génétiquement dont l’éventail sensoriel déborderait les normes généralement admises ? De fait, tout porte à le croire, aussi bien pour résoudre certains points encore énigmatiques de quelques sujets que nous avons traités que pour conférer à ce qui va suivre un fondement rationnel et plausible.


Le Dr Osty situe ce phénomène super-sensoriel au niveau de l’émission encéphalique bien que cette théorie ne repose que sur des hypothèses spéculatives. Il écrit en effet que « le cerveau de l’homme est capable de propriétés physiologiques, dépassant en qualité tout ce que nous avons pu imaginer. » La récente cartographie des régions du cerveau en rapport avec les divers organes auxquels elles correspondent a laissés vacants des blancs inexplicables qui, à première vue, ont aiguillé les conjectures vers une présomption raisonnable d’existence de zones inexploitées et échappant aux cinq sens connus. A quoi donc servent ces milliards de neurones, la nature n’a pas coutume de créer des centres superflus. Au contraire elle nous a habitués à une parcimonie sélective qui fait loi en matière de créations naturelles. L’inutile, c’est pour l’artificiel. Donc, si l’homme dispose d’un bagage neuronique qu’il ne semble pas solliciter dans les activités qui mettent en jeu uniquement les cinq sens traditionnels, on peut supputer avec juste raison, qu’en d’autres temps ces centres commandaient une fonction en sommeil dans l’individu normal : la fonction PSI.


Déjà, la glande pinéale, située grosso modo au sommet du diencéphale a intrigué les physiologistes au point qu’ils en ont été amenés à supposer qu’elle pouvait avoir été en rapport étroit avec un sens subtil et profond dont le temps a eu raison. Comme cette glande est particulièrement développée chez certains reptiles, on n’a pas hésité à la relier à cette faculté de fascination, d’envoûtement dont font montre les serpents vis à vis de leurs proies qu’ils figent en quelque sorte dans une action qui n’est pas sans rappeler l’hypnose.


Cette fonction PSI (2) engloberait un ou plusieurs sens inconnus, connectés directement à ce compartiment inutilisé du cerveau. Cette fonction ne serait pas limitée par le temps ou par l’espace à la manière des sens physiques ce qui expliquerait la place importante qui lui serait réservée dans le cerveau. On a parlé de la moitié ou du moins du tiers des neurones dont l’emploi n’a pu être précisé. L. J. Bendit, qui a rédigé une thèse sur ce sujet (3), s’est posé la question : « Psi est-il le vestige de quelque élément atrophié et devenu biologiquement inutile ou une fonction qui devrait se développer pari-passu avec le reste de l’esprit, à partir de quelque racine archaïque et protopathique, en une forme épicritique appelée à servir un but téléologique ? »


Il semble que la première alternative soit la bonne. En effet, si nous avons dû reconnaître que la flèche de l’intelligence est orientée dans un sens ascendant, on ne peut en dire autant en ce qui concerne la perspicacité humaine et la clairvoyance. En vérité, la montée de l’intelligence n’est due qu’à des facteurs extrinsèques, qu’à une meilleure compréhension dynamisée par des moyens et des instruments nouveaux qui induisent une exaltation, une multiplication et non un affinage ni une épuration. La purification de l’intellect n’est pas pour demain. Chaque pas vers le progrès nous en éloigne sacrifiant le cristal aux matières polymérisées....


Ce mouvement rétrograde fait que G. N. M. Tyrrell ne peut que déplorer :­ « Pourquoi, après six mille ans de civilisation, sommes-nous encore dans le doute au sujet des phénomènes psychiques ? Il se pourrait bien que dans six mille ans on les ait tout simplement oubliés ! »


Actuellement, n’est-il pas déjà trop tard pour tenter de mettre en évidence certaines propriétés psi fonctionnelles ? G. Boring, dans l’introduction du livre du Professeur Hansel (ESP A Scientific Evaluation, 1966), écrit que son ouvrage est « l’histoire de l’échec à prouver l’inexistence de l’E.S.P », ce qui, en aucun cas ne signifie que cet ouvrage est la réussite à démontrer son existence. Joseph-Banks Rhine, jeune botaniste de Chicago, qui en 1926 se joignait au Département de Psychologie Harvard, a fait œuvre de raffinage en instituant une nouvelle parapsychologie plus scientifique et empirique que celle qui prévalait au début du siècle sous le nom de métapsychique. Nous avons été appelés à convenir que ses critères de base à tendance nettement probabiliste n’ont pas été toujours judicieusement choisis et qu’il y a à craindre que les méthodes de Rhine aient finalement annihilé toutes les possibilités d’y voir clair dans un domaine qui s’enfonce dans les brumes de la dégénérescence.


Néanmoins, l’avenir de cette connaissance paranormale échappant au pouvoir de perception purement sensible, cette « extra-sensory perception » ou E.S.P, ce facteur PSI, groupant les prémonitions, la clairvoyance, l’extra-lucidité et la télépathie, appartient désormais à ce jeu de 5 cartes, dit jeu de Zener. Pour notre part, comme notre but est de divertir, le côté anecdotique de ce dont nous allons parler nous paraît plus significatif en l’occurrence que l’information sensationnelle en soit mais fade en substance à savoir que le meilleur sujet de Rhine, nommé Hubert Pearce, un étudiant, dans une série de 300 essais de divination de cartes de Zener a réussi un maximum de 119 succès alors que les probabilités du hasard lui en allouaient 60...


En conclusion, citons Robert Amadou qui universalise cette faculté transcendante dont nous venons d’aborder quelques aspects: « Le phénomène E.S.P ne se rattache à aucun caractère morphologique, physiologique, racial ou autre, identifié chez l’homme ; il est très sensible chez les animaux et il ne semble pas dépendre d’un état pathologique du sujet. » Son étude est toujours en cours, comme en témoigne le récent colloque sur les perceptions extra-sensorielles qui a eu lieu en juin 1969. Souhaitons qu’un jour prochain de grandes découvertes soient faites en ce domaine, pour sauver, si c’est encore possible, les ruines de ce sens profond, par lequel nous possédons tous les secrets du monde en puissance. Alors seulement pourra commencer l’œuvre de restauration qui nous égalera aux dieux dont nous descendons.


Malheureusement trop souvent, des hommes peu scrupuleux ont réussi à simuler la voyance par des subterfuges honteux. De qui avons-nous hérité cette propension aux actions fausses et simulées ? C’est une question intéressante, mais il faudrait bien cent livres comme celui-ci pour y répondre.


Références :

1/ Dr Albert Leprince, Les ondes de la Pensée, Ed. D’Angles.

2/ Cette fonction ou ce facteur PSI est une dénomination proposée par Thouless et Wiesner pour désigner l’énigmatique ensemble des facultés psychiques de perception paranormale et d’action à distance.

3/ L. J. Bendit, Connaissance Paranormale (1951).


Paragraphe de mon livre Terriens ou Extraterrestres (1973), supprimé par l’éditeur ALBIN MICHEL.

samedi 25 novembre 2023

La malédiction du pharaon : une simple allergie fatale ? 


Le sort maléfique attaché à la momie a fait couler beaucoup d’encre. Notamment pour lui trouver une cause moins « magique ». Une française de Strasbourg a-t-elle résolu l’énigme ? A vous d’en juger.


Dessin de Jim Leming 

 Tout d'abord, les faits. Le contexte Au début du siècle, il n'y avait pas de rallyes Paris-Dakar pour procurer des sensations fortes aux milliardaires occidentaux désœuvrés. Mais l'Afrique était déjà là avec ses terrains de chasse aux grands fauves et aussi...ses sites archéologiques. Parmi ces riches passionnés de vieilles pierres - et de trésors enfouis dessous - Lord Carnarvon (1866-1923), aristocrate britannique, commença en dilettante dès 1902 mais, bientôt, il s'adjoignit l'aide d'un professionnel en la personne de l'égyptologue authentique Howard Carter (1874-1939). 

 Lord Carnarvon Source : http://www.touregypt.net/featurestories/carnarvon.htm

 Howard Carter Source : http://fr.wikipedia.org/wiki/Howard_Carter

Jusqu'en 1922, le résultat des fouilles entreprises par Carter et financées par Carnarvon fut bien maigre même si elles se déroulaient dans la fameuse Vallée des Rois, dont ils avaient obtenu la concession avant 1914. C'est là, en effet, juste en face de Louxor et ses temples, par delà le Nil, qu'avaient été exhumées diverses coupelles et jarres marquées au sceau jusqu'alors inconnu de Toutankhamon! Un nom qui allait bientôt faire frissonner la planète entière. Car l'obstination de Carter et la générosité de Carnarvon furent enfin récompensées: le 4 novembre, « un silence inhabituel » attend l'archéologue sur le chantier. La marche d'un escalier taillé dans le roc vient d'être dégagée.


La découverte 

Le 23 novembre, Carnarvon arrive avec sa fille sur les lieux. Carter, qui a attendu la venue de son « sponsor », fait poursuivre les travaux; une première porte, grossièrement « replâtrée » apparaît au bas des 16 marches. Puis s'ouvre un passage en pente et, au bout, une autre porte intacte celle-là. Une petite ouverture y est forée dans le coin supérieur gauche: il s'en échappe une bouffée d'air chaud, nauséeux... Carter y colle son œil, s'éclairant d'une bougie qui vacille sous le souffle; et les formes se dessinent lentement: « d'étranges animaux, des statues, et, partout, le scintillement de l'or ». 

On vient de découvrir « la plus magnifique et la plus riche mise au jour archéologique de tous les  temps »! 

 La brèche est alors agrandie et les merveilles apparaissent aux membres de l'expédition. Tous se précipitent; en s'approchant ainsi, on dira qu'ils ont signé leur arrêt de mort... En effet, ils n'ont guère prêté attention à l'inscription gravée sur la stèle du tombeau. D'ailleurs, une controverse s'éleva au sujet de sa signification. Et pourtant, elle est fort explicite, même si l'on peut chipoter sur les termes exacts: 

« Malheur à ceux qui dérangeront les restes du pharaon », selon le Dr Hollenbeck, présent à cet instant crucial. Quant au Professeur J. C. Mardrus, égyptologue français, il traduit: « Gare à la main qui soulèvera le couvercle de ma tombe, elle sera desséchée... » En fait, le sarcophage ne sera ouvert que trois ans plus tard, mais entre-temps, la malédiction a déjà frappé. 

 L'hécatombe commence 
 Peu après l'inauguration officielle des fouilles, en mars 1923, Lord Carnarvon, très actif sur le terrain, est piqué par un moustique. Infection, puis pneumonie: après une fièvre fluctuante pendant une dizaine de jours, le mécène britannique agonise et meurt. Son trépas est auréolé de mystère: au même moment, à Louxor, la ville subit une panne d'électricité inexplicable et le chien du comte, en Grande Bretagne, hurle à la mort et tombe raide. Le fils de Carnarvon confirmera en 1964. En tout cas, à l'époque, certains passagers du bateau qui ramènera la dépouille du Lord en Angleterre refuseront d'embarquer ainsi.

 Et la presse s'en mêla, ce qui permit au British Museum, de récupérer nombre de reliques égyptiennes accusées de porter malheur. La deuxième mort suspecte survint en la personne de Jay Gould, un touriste et ami américain de Carnarvon, auquel il avait fait visiter la tombe et qui succomba à « une forte    fièvre ». 

La vengeance de la momie  
Mais ne faut-il pas ajouter celle du Sheik Abdu Haman, présent à l'ouverture du tombeau et décédé quelques jours plus tard? Lady Carnarvon tomba, elle aussi, malade, mais elle guérit; ce qui ne l'empêcha pas de passer de vie à trépas en 1929, quand, à son tour, elle fut piquée par un insecte... Huit morts en neuf mois sont démontrées chez des individus ayant de près ou de loin touché à l'affaire Toutankhamon. En 1929, 13; en 1939, 17; en 1950, 28; et en 1980, 32. Je n'ai pas de nouvelles depuis plus de 8 ans de l'unique rescapé de la première heure: Richard Adamson. Il a pourtant dormi pendant plusieurs années dans le tombeau maudit, entre le cercueil d'or et la momie. Mais je gage que s'il n'est pas mort, ça ne saurait tarder... 

Les Egyptiens avaient-ils découvert le moyen de déclencher une malédiction « en concentrant autour de leurs momies certains pouvoirs dynamiques dont nous avons une très incomplète notion » ? Certains en doutent... Alvéolite allergique extrinsèque Eh oui, en attendant suffisamment longtemps, il est fatal qu'un jour, aucun survivant de cet épisode fameux ne subsistera. Et la malédiction là n'y est pour rien, sinon celle qui fait de l'homme quelqu'un de mortel sans exception aucune. 

D'ailleurs, la plupart des « damnés » ont été emportés à des âges fort respectables. Carter mourut en 1939 à 66 ans d'une... cirrhose du foie! La plus jeune des « victimes » fut Mervyn Herbert, demi-frère de Lord Carnarvon, témoin de la découverte et disparu en 1930, à 48 ans. Alors, faut-il ne voir dans tout cela que superstition et coïncidence? Pas exactement tout de même. Pour le Dr Caroline Stenger-Philippe, qui, en 1985, soutint une thèse sur la question à la faculté de médecine de l'université Louis Pasteur de Strasbourg, six morts au moins sont directement reliées à la pénétration dans la tombe. Et toutes présentent « la symptomatologie d'une bronchopneumopathie à précépitine créée par quelque substrat antigénique ». 

En termes moins savants, les morts auraient été causées par une allergie fatale des alvéoles des poumons aux champignons et moisissures développés dans le tombeau dont l'air n'avait pas été renouvelé depuis plus de trois millénaires. Le Dr Arthur Maier, de l'hôpital de Saverne, spécialiste des allergies, donne sa caution à cette hypothèse mais seulement en tant « qu'explication scientifique très plausible ». 

Plus probable, tout au moins, que les autres théories telles que les gaz toxiques ou la radioactivité ou les bactéries mortelles entreposés volontairement par des Egyptiens révélant un savoir qu'on ne leur connaît pas. Plus vraisemblable aussi qu'une histoplasmose due aux excréments de chauves-souris qu'on voit mal survivre si longtemps dans une chambre hermétiquement close... Mais pas suffisante hélas pour justifier le suicide par pendaison, en 1924, de l'égyptologue Hugh-Evelyn White, un de ceux de la bande des 32, qui, juste avant de s'exécuter, écrivait avec son sang: « Je succombe à une malédiction ».

Ni la panne de voiture dont fut la victime le reporter de l'agence France Presse venu interviewer Mme Stenger-Philippe, en 1985. La malédiction toujours à l’œuvre Si, comme on l'a dit, l'idée de malédiction fut inventée le soir de l'ouverture du tombeau par Carnarvon et Carter eux-mêmes pour décourager les velléités des pilleurs ou encore que ce sont les Français qui l'ont lancée « pour saper le prestige britannique en Egypte », il appert qu'on a du mal à imaginer qu'elle se perpétue. Et pourtant... 

Lorsqu'il fut question, en 1967, de transporter une partie du trésor de Toutankhamon à Paris pour exposition, le directeur égyptien des Antiquités, « reluctant » tout d'abord, accepta finalement le projet. Quelques heures après avoir pris cette décision, on l'avertissait que sa fille était dans un état critique à l'hôpital, suite à un accident d'automobile. Pris de remord, l'homme tenta une démarche d'annulation au Ministère de la Culture. En sortant du bâtiment, il fut happé à mort par un véhicule... 

Deux membres de l'équipage de l'avion de la RAF, qui emporta les pernicieuses reliques au British Museum de Londres en 1972, succombèrent à des crises cardiaques subites. L'acteur de cinéma Ian McShane, qui avait accepté le rôle principal dans le film : « La malédiction du pharaon », eut, en 1979, la jambe cassée quand la vieille guimbarde dans laquelle il jouait, s'emballa « comme sous l'effet d'une poussée ». La Lloyd's dut payer les 350 000 dollars de l'assurance. Il est vrai que Joan Collins avait refusé d'y participer...

Oui, je vous dis, la malédiction court toujours... La question qui se pose est de savoir si c'est ailleurs que dans les têtes. Saurons-nous un jour? 

Publié in LE COURRIER DE SAÔNE & LOIRE DIMANCHE du 14 février 1988. Reproduit dans L'INCONNU, N° 170, Août 1990. Dernière mise à jour 9 avril 2010.

mardi 23 mai 2023

 

Edgar Cayce, diagnosticien psychique

 

 

Bon nombre de nos lecteurs connaissent le cas d’Edgar Cayce. Sa vie extraordinaire est désormais l’exemple classique de la servitude terrestre en butte à des facultés sublimes cachées.

 

Toute son existence Cayce lutta, trembla des conséquences possibles de ses dons. Jusqu’à sa mort il tint à en user gratuitement comme si le droit d’en vivre ne lui incombait pas, comme s’il n’en était que le dispensateur et non la source. Son étonnement permanent devant ses pouvoirs en fera l’image d’un possédé illettré incapable de digérer ses propres révélations.

Cayce colle exactement au portrait de l’hominien en proie aux affres de l’intellectualisation artificielle inculquée. Qui sait si cet homme ne fut pas le fac-similé de ces fils de Dieu auxquels nous nous référons sans cesse en un leitmotiv fondamental.

 

Si l’on en croit la chronique (surtout la Fondation Edgar Cayce fondée après sa mort pour perpétuer le nom du grand voyant), l’enfance d’Edgar ne fut pas exempte de ces signes avant-coureurs qui caractérisent l’éclosion de la médiumnité ; pour ne pas nous répéter, disons que le gamin, après une violente altercation avec son père au sujet de son manque d’attention à l’école, découvrit sa faculté de mémorisation dans le sommeil en prenant comme oreiller les livres à apprendre. L’incident qui allait vraiment lui faire prendre conscience de son don survint alors qu’il avait 13 ans. Jouant au base-ball, il reçut un coup de bâton dans le dos dont les effets mirent plusieurs jours à se manifester. La commotion tout d’abord fut marquée par un changement radical de caractère : l’enfant d’habitude réservé, rêveur, se mit à mener une vie désordonnée. Finalement, il eut un gros accès de fièvre et sombra dans le coma. Mandé d’urgence, le médecin de famille eut un gros problème à solutionner quand il dut reconnaître son impuissance à déceler la moindre lésion. C’est alors que la voix d’Edgar, étrangement posée, s’éleva :

 

- Pour me ranimer, il faut faire un cataplasme spécial à base d’oignons crus et plantes médicinales et me l’appliquer sur la nuque.

 

Ainsi fut fait ! Le lendemain Edgar était sur pied... et fort embarrassé pour expliquer son étrange comportement. A vingt deux ans, il fut présenté à celle qui allait devenir la compagne fidèle de sa vie : Gertrude. Cayce, tant qu’il vécut, eut maille à partir avec des extinctions de voix soudaines dans lesquelles il voyait un avertissement coercitif de la part de l’entité dormant en lui, à son insu, et avide de s’extérioriser. Ce combat incessant d’un petit libraire dominé et astreint à des actes inintelligibles à son entendement vigile lui valut le sobriquet d’ « homme du mystère ».

 

Plongé en état profond d’hypnose, Edgar se montrait apte à rendre des diagnostics médicaux à distance. Il guérira de cette manière quinze mille personnes homologuées. Est-il besoin de préciser que la plupart de ses clients étaient des cas désespérés, abandonnés par la médecine officielle. Il se trouva toujours autour de Cayce quelque bonne âme altruiste pour organiser les séances et inciter le médium à guérir moyennant finance. Ce ne fut que dans la deuxième partie de sa vie que cette personnalité hors de pair accepta des rémunérations sous la pression de son entourage et des événements malheureux qu’attirait sur lui son manque perpétuel d’argent. Photographe de métier, il ne put jamais exercer cette profession car il avait la mauvaise fortune de brouiller les clichés ou d’obtenir des quintuples expositions malgré tous les soins qu’il prît. En cela Cayce possédait sûrement par devers lui un pouvoir psycho-photographique dont il ne tira que des désagréments.

 

La méthode de Cayce relevait réellement du prodigieux ! On y cherche vainement un support. Il suffisait qu’une lettre lui parvienne au courrier du matin indiquant nom et adresse d’un malade pour que, par une sorte de téléportation stupéfiante, l’après-midi il sorte sa formule rituelle : - Nous avons devant nous le corps de X... Suivait alors une description souvent simpliste mais d’une justesse hallucinante de la lésion et la médicamentation prescrite rappelait en général les remèdes de bonne femme tandis que son efficacité était sans appel. Et le diagnosticien n’avait pas quitté le canapé sur lequel il reposait durant ses lectures.

 

A une occasion, Edgar prescrivit une drogue du nom d’« eau d’orvale ». Il s’avéra vite que ce médicament n’existait pas même à New York. L’associé du moment, en l’occurrence James Andrews, magnat des chemins de fer américain, guéri miraculeusement par le diagnosticien psychique, fit passer des annonces dans les revues médicales du monde entier, tandis qu’on demandait lors d’une séance suivante un complément d’information. Cayce donna la formule du produit, lui : qui ne connaissait la chimie que de nom. Celle-ci se révéla identique à ce que communiqua plus tard un jeune médecin français dont le père, médecin également, avait cessé la production de cette eau d’orvale 50 ans auparavant !

 

Une anecdote mérite aussi d’être contée. Un jour, la « lecture « quotidienne de Cayce fournit quatre diagnostics de plus que ce qui avait été prévu. Gertrude, à cette époque assistante d’Edgar, ne savait que faire de cet excé­dent. Cayce sombrait-il dans la démence ? Que non ! Le surlendemain, arrivaient au courrier quatre lettres correspondant exactement aux maladies décelées. Quarante huit heures à l’avance, son mari avait « visité » quatre patients au moment même où ils lui écrivaient. Comble ! il arriva même un jour que Cayce ordonna un médicament non encore mis sur le marché et encore au stade de l’expérimentation.

 

Cayce fut aussi nommé l’homme des miracles. Certaines de ses prédictions ont du mal à s’insérer hors du merveilleux. Jugez-en plutôt! Le directeur de la Southern Railway, compagnie privée américaine de chemins de fer, avait un grave problème de responsabilité à résoudre concernant un accident. Cayce, qui était en contact avec le frère de ce directeur, fut sollicité pour « donner des éclaircissements » (1) sur les causes de cette affaire. La lecture prit figure de dénonciation en accusant un brave mais vieil employé au dessus de tous soupçons. Le voyant, devant l’incrédulité qu’on lui opposait, se permit d’anticiper en annonçant que si l’employé demeurait à son poste un autre accident se produirait avant le premier décembre, en Virginie et en Virginie Occidentale avec mort de celui qui avait refusé la créance de ses dires. Point ne fut tenu compte de cette noire prévision. Et pourtant... le 29 novembre, le vieil aiguilleur faillit à son devoir. Au bout de cette voie de garage laissée en communication avec la ligne où devait passer l’express, dormait le frère du directeur. Les pions étaient disposés. La collision eut lieu à minuit. « Le wagon privé fut projeté hors des rails et alla s’écraser au delà de la frontière d’Etat. » Il y eut mort d’homme. Une fois de plus Cayce avait eu raison.

Le médium collabora même avec un juge pour démêler une affaire de titres volés. On usa du vil chantage sentimental pour le contraindre à indiquer les gagnants des courses de chevaux, ce qu’il fit toujours avec succès sans en profiter personnellement.

 

Cayce sauva la vue de son fils ainé aveuglé par un éclair de magnésium par des compresses d’acide tannique, traitement jugé délirant par les spécialistes qui, eux, préconisaient l’extraction de l’œil. Les prescriptions avaient l’insi­gne avantage de déplaire souverainement à la médecine traitante mais de réussir là où cette médecine échouait! Gertrude souffrit des poumons au point qu’il fut décelé une tuberculose avancée. Edgar la sauva à l’aide d’héroïne et de vapeur d’alcool se dégageant « d’un tonneau de chêne à l’intérieur calciné ». A plusieurs reprises, Cayce tomba dans des comas sans cause apparente. Sa léthargie faisait craindre à son entourage une issue fatale : le pouls était imperceptible, la température nettement hypothermique. Chaque fois, à l’exception d’une il est vrai..., l’homme sortait de ce néant aussi lucide qu’après une nuit de sommeil.

 

Fidèle à lui-même, Edgar Cayce annonça la date de sa mort alors que rien ne la laissait présager organiquement parlant. Le 5 janvier 1945, la plus troublante énigme vivante du XXême siècle entrait dans la légende.

 

 

1) L’homme du mystère, Edgar Cayce, Joseph Millard, Ed. J’ai lu, 1970.

 

 

 

Paragraphe proposé dans le livre Extraterrestres en exil (1975) et supprimé par l’éditeur pour écourter le texte.

dimanche 7 mai 2023

 

Eureka !


Par Michel Granger


          C’est le cri « humain » par excellence, celui qui vient directement du cerveau. Le « Aha » créatif à nul autre pareil, la décharge de notre raison, l’éjaculation de notre perspicacité.


J’ai toujours eu un grand respect pour les inventeurs. Entendons-nous bien, n’est-ce pas : pour les vrais ! Pas les tâcherons du plan d’expérience, ni les pilleurs d’idées des autres.

Ayant été moi-même chercheur pendant plus de 20 ans, j’ai rencontré, hélas, plus de prédateurs intellectuels que d’authentiques découvreurs.


La méthode pour inventer n’est pas inventée

Y a-t-il une méthode efficace et rationnelle pour créer quelque chose d’original, résoudre un problème par une solution inédite, inventer quoi ?

La formule linéaire de généralisation consistant à « déplacer » une solution d’un domaine à un autre et que j’ai vue prônée par de faux professeurs Nimbus n’est qu’un ersatz, un succédané pitoyable, grâce auquel certains médiocres chercheurs de carrière se sont fait une réputation usurpée .

L’acte créateur est d’une tout autre espèce touchant à l’essence même de la pensée. Comme l’affirmait en 1985, le grand Irving Chargaff, fondateur de la biologie moléculaire : « Il y a trop aujourd’hui de recherche systématique, analogiques, au cours desquelles des choses prévisibles sont trouvées. Les vraies découvertes sont, elles, imprévisibles ».


Imprévisibles et newtoniennes

C’est ainsi que nombre d’inventions majeures ont été faites sans planification stricte et autres soucis de la productivité moderne. La créativité humaine ne se gère pas comme les stocks de marchandises ou alors, il n’en sortira que des évidences, l’esprit d’innovation étant tué par les lourdes structures d’encadrement mises en place tout autour.

La société américaine BP semble bien l’avoir compris qui a adopté une stratégie unique pour son unité de recherche, en réunissant un groupe d’individus « optimistes » et les plaçant dans le contexte de liberté et d’encouragement dont ils ont besoin pour « permettre à leur créativité de s’épanouir ». Certaines sociétés françaises font hélas exactement le contraire.

Il s’agit pourtant ni plus ni moins que de faire en sorte que la pomme qui tomba de l’arbre sur la tête de Newton ne lui fit pas seulement une bosse mais lui inspira la théorie de la gravitation. Les laboratoires de recherche sont remplis de crânes bien pleins et bosselés sans que le moindre « eurêka » ne retentisse. Il leur manque la sérénité propice aux flashes créatifs qui trop souvent s’apparentent au rêve ou à l’expérience mystique.


Inventions rêvées

Les exemples sont légions de découvertes et d’inventions « rêvées »; en chimie par exemple, dès 1869, Dimitri Ivanovich Mendeleyev voit son fameux tableau périodique des éléments avec tant de cases vides qu’elles se rempliront au fur et à mesure des découvertes futures ! L’image du serpent Ourobouro qui se mord la queue, surgie dans l’esprit embrumé de Friedrich Kékulé, s’avéra le meilleur moyen de décrire la molécule de benzène, dont il cherchait vainement la structure. Le premier compteur à gaz de Sir Charles V. Boys fut détourné d’une vision onirique. L’aiguille trouée de la machine à coudre fut suggérée à Elias Howe quand, dans un cauchemar, des cannibales imaginaires le chargèrent avec des lances trouées...

Et que dire du rêve de Charles Babbage qui, en 1830, inventait l’ordinateur. Les premières machines digitales virent le jour plus d’un siècle après. De même, James Watt conçut le premier moteur à vapeur en deux jours et mit 10 ans pour le réaliser !


Mais il y a encore un mécanisme plus subtil du principe « Eurêka ».


Inventions fortuites

Les Anglo-saxons parlent de « sérendipité », ayant forgé ce nom à partir d’un conte de fées !

Ne cherchez pas dans vos dictionnaires, ce mot est tabou en français ! Il s’oppose, en effet, à notre cartésianisme légendaire en remarquant que très souvent (trop) un accident heureux figure à l’origine des grandes inventions.

La place me manque pour donner des exemples relevant de cette « sérendipité ». C’est C. Colomb découvrant l’Amérique alors qu’il cherche la route des Indes, Sir Alexander Fleming éternuant dans un bouillon de culture, ce qui mettra fortuitement en évidence l’action antibiotique de la pénicilline. C’est aussi le Dr Plunkett fabriquant accidentellement du téflon en stockant au froid un mélange qui, sans cela, aurait conduit à une magistrale explosion... Et, plus récemment, la contamination de protéines conduisant à une méthode d’électrophorèse pour identifier instantanément différentes souches de bactéries.

C’est « la Nature qui chuchote à notre oreille », aiment à dire les intuitifs. Sur cette idée de prescience innée, nous avons écrit, un collègue et moi, un livre intitulé : « L’Homme conscience de la Matière » , édité en 1983 aux Editions Présence.


Stimulation ratière

Je voudrais terminer en fournissant une réponse indirecte à la question : « Y a-t-il encore beaucoup de choses à inventer ? »

Savez-vous ce que proposa Charles H. Duell, directeur du bureau des brevets américains en 1899 : ni plus ni moins que de fermer son organisme « puisque tout ce qui pouvait être inventé l’avait été » ?

Qu’un tel timoré de l’imagination ait pu accéder à ce poste contraste avec la fécondité de certains thèmes de prédilection pour inventeurs en mal de créativité. Le record est tenu, devinez par quoi ? Plus de 4000 brevets y ont été consacrés : aux pièges à rats ! L’archétype de l’invention qui préoccupait déjà les Babyloniens ; depuis la conception de la tapette, en 1838, le problème n’a cessé de hanter l’hémisphère droit du cerveau humain, là où précisément on sait que se situe le centre de l’intuition.. Il en a résulté des dispositifs à guillotine, des harpons, des adhésifs, des systèmes d’électrocution, de noyage, d’asphyxie etc…

Le piège à rats le plus cher est la souricière déclenchée par un rayon laser : coût 7000 F. Le plus sophistiqué, il a reçu l’oscar de la perfection, détecte la présence du rongeur, lui tire une flèche à travers le corps, l’écrase et le calcine entre deux plaques et, enfin, disperse ses cendres. Le réarmement est automatique...

Comme l’est heureusement celui du ressort de notre faculté créatrice à inventer.


Publié dans Le Courrier de Saône & Loire Dimanche du 25 mars 1990.

Republié dans Science & Magie n°38, juin-juillet 1995.